Quels sont les ingrédients d’un sprint d’innovation et surtout, au-delà de l’évènement ponctuel, qu’est-ce qu’il révèle de notre époque et de notre future relation au travail ?
Pour ce billet, je me base notamment sur Museomix, marathon créatif de 3 jours destinés à réinventer le rapport musée-visiteur. En effet, du 11 au 13 novembre 2016, 18 musées de 5 pays ont décidé d’ouvrir leurs portes à des volontaires, chargés d’inventer et fabriquer des prototypes destinés à rendre plus attractive l’expérience muséale.
Ce lundi 14 novembre 2016 a eu lieu la clôture de l’édition 2016 de Museomix avec la visite des professionnels du monde muséal.
Ils ont pu ainsi découvrir dans leur propre musée les prototypes fabriqués par des mordus d’innovation.
Né en 2011 au Musée des Arts décoratifs à Paris, Museomix 2016 s’est en effet déroulé en parallèle dans 18 lieux en France, Suisse, Belgique, Italie et au Québec. Le temps d’un week-end intense, ces lieux se sont transformés en un laboratoire d’idées et de création où les participants ont eu carte blanche pour imaginer de nouvelles expériences et de nouveaux dispositifs sur des thèmes en rapport avec les collections de chaque espace.
Ayant vécu cette aventure en Suisse en tant que facilitateur, j’ai relevé trois ingrédients d’un tel succès.
Tout d’abord, il faut signaler la constitution naturelle des équipes. Chaque participant s’est en effet inscrit volontairement et a rejoint, par un processus collaboratif, le projet sur lequel il souhaitait s’investir. Et chaque équipe a pu s’enrichir du travail des autres groupes, par le biais de pitchs et d’échanges informels sur les réseaux sociaux. Bien loin d’une compétition, cet évènement est en réalité une œuvre collective, où les séances de travail succèdent à des moments de détente propices à la sérendipité et à l’exploration d’idées nouvelles.
Aussi surprenant que cela puisse paraitre, aucun participant n’est un spécialiste strict du monde des musées. Par contre, les solides compétences dont ils disposent viennent percuter et donc transformer la représentation que ces lieux ont de leur rôle et de leur rapport au public. Et c’est bien l’effet recherché, car ces spécialistes des usages, du graphisme, de la programmation et même de la fabrication sont bien les seuls à pouvoir bousculer les traditions et paradigmes dans lesquels les musées se sont installés. « People make museum », telle est donc la devise bien réelle de Museomix !
Enfin, ces sprints d’innovation sont aux antipodes d’une conférence universitaire : le faire est à l’honneur, puisque de très nombreuses ressources techniques étaient mises à disposition : ateliers numériques de fabrication, stands plus traditionnels de menuiserie et découpe. Et le résultat est là : de nombreux prototypes réels et fonctionnels sont désormais disponibles pour une production plus large car proposés sous licences libres.
Au-delà de l’évènement et de ses facteurs de succès, ce type d’évènement révèle le besoin de sens dont nous avons besoin en tant qu’individus.
Actuellement les entreprises parlent beaucoup de désengagement de leurs salariés. Probablement car les enjeux qu’elles proposent leur semble dérisoire. S’engager oui, mais une bonne raison ! S’engager lorsqu’on a la possibilité de choisir le projet et la façon de le mener à bien. S’engager lorsque le challenge proposé soutient la motivation et décuple l’énergie. Et enfin, s’engager lorsque l’évènement contribue directement à l’agenda personnel de chaque personnel, qu’il s’agisse d’une volonté de réseautage, de développement de compétences ou de visibilité.
En parallèle de ces besoins individuels, les organisations culturelles et plus largement les entreprises ressentent toutes le besoin impérieux d’oxygénation par la collaboration poussée avec le monde extérieur. De plus en plus incapables à le faire elles-mêmes, la nécessité de faire entrer des ressources supplémentaires et compétences nouvelles prend aujourd’hui des appellations diverses, comme l’entreprise étendue ou éco-systémique. Et qui n’a pas entendu parler de l’innovation ouverte, évoquant les partenariats tissés entre les entreprises et des partenaires de plus en plus divers, tels les start-ups, laboratoires de recherche, fournisseurs ou même directement des utilisateurs ?
Ainsi les revendications des individus et des entreprises convergent vers une transformation progressive de la relation au travail.
Déjà, la généralisation de la mission, c’est-à-dire du projet court et ponctuel répondant à un besoin bien spécifique.
Nécessairement la nécessité de savoir interagir en intelligence collective, pour collaborer avec des profils différents et s’adapter rapidement à une situation singulière.
Enfin, l’on peut émettre le pari que demain, nous aurons des modes de travail plus diversifiés alternant plus rapidement et plus facilement missions ponctuelles mais stimulantes et occupations plus routinières mais sécurisantes. Un travail de plus en plus hybride, flexible et individualisé.
Cet article sur les fab-labs devrait vous intéresser, ainsi que celui-ci, sur l’empathie au service du Design Thinking.
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