Le développement de nouveaux produits, une approche efficace pour évaluer le succès d’un projet innovant

Les projets innovants ont cette particularité d’évoluer dans l’inconnu et l’incertitude, sans que la destination ne soit connue à priori. De ce fait, comment est-il possible d’en mesurer les résultats ?

Cet article fait partie d’une série qui se propose de présenter les méthodes d’évaluation des projets innovants. Les cas d’application les plus immédiats sont les suivants :

  • Intrapreneuriat
  • Pilotage d’une innovation
  • Coaching d’une équipe innovante
  • Arbitrage d’un portefeuille de projets
  • Audit de projet

Ce billet présente la 4ème approche, nommée « création de capacités ».

Le développement de nouveaux produits a souvent été perçu comme un moyen de régénérer la base de connaissances

Plus précisément, les connaissances acquises lors de l’échec commercial d’un projet sont souvent déterminantes pour des succès ultérieurs. A contrario, des succès conduisent souvent à désapprendre les constituants du processus qui a conduit à la réussite. Succès et échecs se succèdent souvent dans un cycle irrégulier d’apprentissages et de désapprentissages.

Ainsi, le développement de nouveaux produits, de nouveaux processus de production et de nouveaux services sont l’énergie vitale de toute entreprise : seules les organisations capables de se réinventer continuellement en développant de nouveaux produits survivront et prospéreront.

Un projet fabrique à la fois le produit et également de nouvelles connaissances, qui viennent renouveler le stock de compétences de l’entreprise. Cet apprentissage provient d’une transformation de connaissances tacites, individuelles ou collective en connaissances explicites utilisables par l’entreprise comme matériau tangible pour innover.

Le processus de conception fournit donc un nouveau produit ainsi que de nouvelles connaissances.

La capacité à utiliser ces connaissances « produites en excès » est un élément essentiel pour renforcer les compétences de conception au fur et à mesure des projets.

On peut parler d’apprentissages cumulatifs lorsque la trajectoire suivie par une entreprise est liée à ces décisions, produits et apprentissages précédents

L’évolution des produits et marchés est rarement aléatoire. Une itération, du produit ou du marché, est souvent permise par une relation avec la trajectoire créée précédemment par l’entreprise.

En effet, même si un projet n’atteint que partiellement ses objectifs, il aura probablement produit des informations et données qui pourront se révéler importantes pour un futur projet. C’est ainsi que l’on peut mettre en avant différentes transformations, à plusieurs niveaux :

  1. Au niveau des personnes et équipes, avec l’émergence de nouvelles compétences, individuelles et collectives
  2. Au niveau des idées et connaissances, par la création et la diffusion de nouvelles idées
  3. Au niveau des produits, via la définition de nouveaux produits et l’enrichissement de la gamme de produits déjà présents
  4. Et enfin, au niveau des capacités de l’entreprise, avec la création de nouveaux brevets, le développement et la transformation de capacités existantes

L’évaluation d’un projet d’innovation ne peut se limiter à la phase de développement

Elle doit inclure l’ensemble du périmètre, depuis les toutes premières étapes d’exploration jusqu’à son exploitation sur de multiples projets.

L’apparition de la preuve de la valeur de l’innovation n’est ainsi pas limitée à un moment particulier de la fin du projet mais au contraire s’étend sur une période beaucoup plus longue.

Ainsi, mesurer les apports d’un projet en se limitant à des mesures projet par projet ne permet pas de prendre en compte les effets de la réutilisation. Il convient de tenir compte de l’acquisition de connaissances au fur et à mesure des projets. Ceci est particulièrement le cas en conception innovante où l’exploration est inhérente au processus

De ce fait, le projet produit bien davantage de connaissances qu’il n’est strictement nécessaire pour obtenir le résultat final.

Ces auteurs s’appuient notamment sur le cas de Tefal, dont la croissance et la rentabilité peuvent s’expliquer à la lumière de l’efficacité de la réutilisation des capacités, dans une logique de « lignées » particulièrement performantes.

Cependant, pouvoir exploiter ces nouvelles capacités est loin d’être simple.


Bibliographie :

  • Bowen et al. 1994. The Perpetual Enterprise Machine: Seven Keys to Corporate Renewal through Successful Product and Process Development
  • Keil, McGrath, et Tukiainen. 2009. Gems from the Ashes: Capability Creation and Transformation in Internal Corporate Venturing
  • Le Masson, Hatchuel, et Weil. 2006. Les processus d’innovation : Conception innovante et croissance des entreprises
  • Le Masson, Weil, et Hatchuel. 2014. Théorie, méthodes et organisations de la conception
  • Maidique et Zirger. 1985. The new product learning cycle
  • Maniak. 2010. Mapping the « Full Value » of Innovative Features in Projectified Firms
  • Midler et Silberzahn. 2008. Creating Products in the Absence of Markets: A Robust Design Approach
  • Nonaka et Takeuchi 1995. The Knowledge-Creating Company: How Japanese Companies Create the Dynamics of Innovation

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